LOCOAL 1873 - L'HUÎTRE...future perle...



L'huître et la rivière d'Etel ont sûrement une vieille, très vieille histoire entre elles mais cette huître n'a du faire vivre ses riverains qu'à la fin du 19ème siècle; il se dit que des familles de Groissillons sont venus peu à peu s'installer, encouragés peut-être par les premiers, encouragés aussi par le chemin de fer, "locomotive" de toute la région côtière mais surtout découragés par la crise de la pêche au début du 20ème siècle...ceci dit tout à fait résumé.
Mais avant les Greks, un journaliste du Figaro passe par Locoal en 1873  et nous raconte à sa manière ce qui se passait autour de l'étang de Saint Jean, animé, comme souvent, par un de ces originaux qui ont quelquefois raison mais toujours trop tôt et qui tombent aussi vite dans l'oubli.



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Locoal-Mendon, 14 septembre 1873

Quel étrange pays que celui-ci !
A chaque pas on y découvre des souvenirs des époques héroïques, et c'est le progrès industriel, qui va rendre à ces contrées jadis célébrées leur éclat perdu.
Après les Templiers et les chevaliers, de Saint-Jean de Jérusalem, aujourd'hui oubliés même par les Bretons, voici les cultivateurs d'huîtres qui vont restituer à la baie d'Etel, le plus triste des golfes de la basse Bretagne, sa célébrité d'autrefois. Au sortir du bourg de Locoal-Mendon, on descend, par une pente assez raide dans l'immense vallée que la mer a envahie et dont elle a fait la baie ou rivière d'Etel.
Une chaussée traverse le premier relais de mer et supporte un monument bizarre, sorte de pyramide décorée d'une croix de Malte, seul vestige du séjour des Templiers. A peu de distance, au bord du lac, s'élève une petite chapelle, qui n'est autre chose que l'église des chevaliers de Saint Jean.
Le bruit constant d'une chute d'eau puissante retentit seul dans cette solitude. ...que voulez-vous? La chaussée des Templiers a servi de point d'appui à un jeu d'écluses. La chapelle de Saint Jean est presque l'enseigne d'une vaste pêcherie.
Coupant le relais de mer de façon à en faire un lac immense, des digues retiennent, au milieu des terres, entre l'île de Locoal et la terre ferme, quelques millions de mètres cubes d'eau salée dans laquelle vivent les anguilles d'eau douce, — selon la méthode de M. Coste, — et dans laquelle aussi vont s'engraisser des huîtres, genre de Marennes, selon la méthode du capitaine Georget.
Certes, voilà un bien sigulier type, que ce capitaine au long cours qui s'est pris tout à coup d'une belle passion pour les huîtres et a demandé à la mer comment elle s'y prenait, pour donner aux mollusques de Marennes leur saveur particulière et la belle couleur verte qui les recommande à l'attention des connaisseurs! La mer lui a répondu:
« Dis adieu à ton beau navire ! Renonce au costume sinon brillant du moins confortable des marins du commerce et, vêtu plus misérablement que le dernier des pêcheurs, va passer tes jours dans la vase liquide où tu enfonceras jusqu'à la ceinture. Armé d'une pelle, remue cette vase, creuse dans sa masse infecte et mobile de grandes fosses au fond desquelles tu poseras délicatement des huîtres ordinaires, que recouvrira le flot et, au bout d'un an, ces huîtres  deviendront les meilleures, les plus  belles, les plus estimées du monde! »
Voilà ce que lu mer a dû dire au capitaine Georget. Aussi ai-je trouvé ce brave marin, barbotant avec son fils dans la baie d'Etel et poursuivant la solution de ce problème : "donner aux huîtres armoricaines, en leur conservant leurs qualités propres, la couleur et la saveur des huîtres de Marennes !" C'est dans un an seulement que l'on saura à quoi s'en tenir.
Je livre d'avance aux gourmands le nom de l'intelligent et modeste ouvrier que la Société des Huîtrières du Morbihan a nommé garde-chef des établissements de Locoal-Mendon. C'est un nom à retenir pour le jour du triomphe.
En attendant cet heureux moment, le capitaine Georget n'est pas trop à plaindre, car il aime la pêche, et certes jamais pêcheur n'a eu sous la main pareil coup de filet. Le flot envahit chaque jour l'immense lac de Saint-Jean et y amène d'innombrables poissons que retiennent les digues et les écluses.
Puis l'eau se retire par les vannes, tamisée dans de vastes cadres de toile métallique qui ne laissent pas passer une crevette. Le poisson s'accroît donc sans cesse en quantité et en grosseur, dans ce lac dont des gardes vigilants défendent l'approche. Le jour où l'on jettera les filets dans ces eaux, il faudra des trains spéciaux de chemins de fer ou des navires pour emporter dans les villes le produit de cette pêche vraiment miraculeuse.
C'est cet ensemble de créations, pêcheries de poisson et culture d'huîtres qui compose l'établissement de Locoal-Mendon. Ce sont là de grandes entreprises, qui nécessitent un mouvement considérable de capitaux en même temps qu'un grand déploiement d'activité. Mais la mer, plus généreuse que la terre la plus féconde, rend au centuple les biens qu'elle reçoit, c'est ainsi que les huitres, nées dans les rivières d'Aura et de la Trinité, mises en nourrice dans les parcs de Locmariaquer, seront conduites adolescentes dans les bassins de vase de Locoal-Mendon, pour y prendre les qualités des produits si estimés de Marennes. Tous ces établissements, aujourd'hui en pleine exploitation, quant aux huîtres armoricaines, aux moules, aux crevettes-bouquet, aux poissons de toutes sortes, datent à peine de quelques années, et c'est déjà par millions qu'ils comptent leurs produits.
Qui a mis en œuvre ces moyens nouveaux? Qui a accepté, alors qu'on les discutait encore, les idées pratiques de M. Coste? Qui apporte dans ce pauvre pays du Morbihan ces éléments d'une immense et inépuisable prospérité?
... C'est vous, lecteurs, c'est moi, c'est tout le monde. C'est l'actionnaire de la Société huîtrière du Morbihan, compagnie inconnue hier et qui sera puissante demain, grâce à l'esprit d'initiative, à l'activité prodigieuse, à l'intelligence commerciale de son jeune directeur - administrateur, M. Georges Coulon.

Alfred d'Aunay

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Deux oeuvres de René-Yves CRESTON - voir ICI

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Sur Jacques Costes - décédé quelques jours après cet article - extrait de Wikipedia:
En 1852, il est nommé par Napoléon III à la tête d'une mission d'études sur la production des gisements naturels d'huîtres. Sa synthèse, établie à partir d'une enquête menée notamment à Fusaro et à Marennes, paraît en 1855 sous le titre Voyage d'exploration sur le littoral de la France et de l'Italie. Proche de l'Empereur et de l'impératrice Eugénie, dont il était le médecin personnel, il est nommé Inspecteur général des pêches maritimes, poste qui sera supprimé à sa mort. Il développe des expériences d'huîtrières artificielles, notamment à Arcachon en 1859.
Victor Coste crée en 1859 la station marine de Concarneau.
Il est nommé président de l'Académie des sciences en 1871. Il meurt en 1873 au château de Rézenlieu dans l'Orne, un peu oublié et aveugle, critiqué par la communauté scientifique. Son rôle de pionnier fut reconnu plus tard. Il est considéré comme le père de l'ostréiculture moderne.

Sur le capitaine Georget: rien, peut-être, Jacky Georget - les viviers de Kercroc en Plouharnel - en est-il un lointain descendant? 

Sur Georges Coulon, rien....



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Vente de lais de mer en 1872

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